**La Rencontre au Puits**
Le soleil de midi brûlait sans pitié sur la terre aride de Samarie. Jésus, fatigué par une longue marche depuis la Judée, s’assit au bord du puits de Jacob, près de la ville de Sychar. Ses disciples étaient partis acheter des provisions, et il restait seul, le visage marqué par la poussière du chemin.
C’est alors qu’une femme s’approcha, une cruche sur l’épaule. Elle venait puiser de l’eau à l’heure la plus chaude du jour, une heure où personne ne se risquait dehors. Peut-être cherchait-elle à éviter les regards méprisants des autres femmes, celles qui venaient en groupe le matin ou le soir.
Quand elle vit Jésus, un Juif, assis là, elle hésita. Les Samaritains et les Juifs ne se fréquentaient pas, leurs divisions remontant à des siècles de conflits religieux et politiques. Pourtant, Jésus leva les yeux vers elle et lui dit d’une voix douce mais ferme :
« Donne-moi à boire. »
La femme sursauta. Un Juif lui parlait ? Et qui plus est, un homme s’adressant à une femme seule en public ? Elle répondit avec une pointe de défi :
« Comment ? Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? »
Jésus la regarda avec une intensité qui perça son cœur. « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. »
La femme fronça les sourcils. « Seigneur, tu n’as même pas de seau, et le puits est profond. D’où aurais-tu donc cette eau vive ? Serais-tu plus grand que notre père Jacob, qui nous a donné ce puits et en a bu lui-même, ainsi que ses fils et ses troupeaux ? »
Jésus sourit légèrement, comme s’il voyait au-delà de ses mots. « Quiconque boit de cette eau aura encore soif. Mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. Au contraire, l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »
La femme, intriguée, répondit : « Seigneur, donne-moi cette eau, afin que je n’aie plus soif et que je n’aie plus à venir puiser ici. »
Alors Jésus, avec une douceur empreinte d’autorité, lui dit : « Va, appelle ton mari et reviens ici. »
Un silence pesant tomba. La femme baissa les yeux, son cœur battant plus vite. « Je n’ai pas de mari », murmura-t-elle.
Jésus ne la condamna pas. Au lieu de cela, il dit : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari, car tu as eu cinq maris, et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari. En cela, tu as dit vrai. »
La femme recula, stupéfaite. Comment cet homme pouvait-il connaître sa vie ? Une vie marquée par les échecs, les abandons, la honte. Pourtant, au lieu de la rejeter, il lui parlait avec une vérité qui ne blessait pas, mais qui libérait.
« Seigneur, je vois que tu es un prophète », dit-elle, cherchant à détourner la conversation vers un terrain plus sûr. « Nos pères ont adoré sur cette montagne, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. »
Jésus secoua la tête. « Femme, crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. Mais l’heure vient, et elle est déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont là les adorateurs que le Père cherche. Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité. »
La femme sentit une lumière se lever en elle. « Je sais que le Messie vient, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, il nous annoncera toutes choses. »
Jésus lui dit alors, avec une douceur solennelle : « Je le suis, moi qui te parle. »
À cet instant, les disciples revinrent, étonnés de le voir converser avec une femme, mais aucun n’osa poser de questions. La femme, quant à elle, laissa sa cruche sur place et courut vers la ville, criant à tous ceux qu’elle rencontrait :
« Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait ! Ne serait-ce pas le Christ ? »
Beaucoup de Samaritains crurent en Jésus à cause de son témoignage. Ils l’invitèrent à rester parmi eux, et il demeura deux jours, enseignant et confirmant par sa parole qu’il était vraiment le Sauveur du monde.
Ce jour-là, au bord d’un puits poussiéreux, une femme brisée trouva l’eau vive. Et une ville entière découvrit que le Messie était venu, non pas pour les rejeter, mais pour les sauver.