**La Fuite de Jacob et le Conflit avec Laban**
Le soleil se couchait à l’horizon, teintant le ciel de pourpre et d’or, tandis que Jacob se tenait près de ses troupeaux, le cœur agité. Depuis des années, il avait servi son oncle Laban avec fidélité, mais les murmures hostiles des fils de Laban et le changement d’attitude de son beau-père ne lui laissaient plus de répit. « Les biens de Jacob sont devenus les nôtres », disaient-ils avec jalousie. Et Laban, qui autrefois le regardait avec bienveillance, ne lui souriait plus.
C’est alors que la voix de l’Éternel résonna dans le cœur de Jacob : *« Retourne au pays de tes pères, dans ta famille, et je serai avec toi. »* Ces paroles firent frémir l’homme qui avait autrefois fuit la colère d’Ésaü. Il était temps de partir.
Sans perdre un instant, Jacob convoqua secrètement ses deux épouses, Rachel et Léa, dans les champs où paissaient ses brebis. « Vous savez comment j’ai servi votre père, dit-il d’une voix grave. Malgré ma loyauté, il a changé mon salaire dix fois, mais Dieu ne lui a pas permis de me faire du mal. Quand il disait : « Les brebis tachetées seront ton salaire », tout le troupeau donnait des petits tachetés. Et quand il exigeait les rayées, les agneaux naissaient rayés. C’est l’Éternel qui a pris ce qui était à votre père pour me le donner. »
Les yeux de Léa s’emplirent de tristesse tandis que Rachel serrait les poings. « Avons-nous encore une part dans l’héritage de notre père ? demanda Léa. Ne nous a-t-il pas vendues et mangé notre argent ? Tout ce que Dieu t’a pris à notre père nous appartient, à nous et à nos enfants. Fais donc ce que Dieu t’a dit. »
Ainsi, dans le secret de la nuit, Jacob rassembla tout ce qu’il possédait : ses troupeaux, ses serviteurs, ses femmes et ses onze enfants. Il traversa le fleuve en hâte, se dirigeant vers les montagnes de Galaad, en direction du pays de Canaan. Mais avant de partir, Rachel, sans que Jacob ne le sache, vola les théraphim, ces idoles domestiques qui appartenaient à son père. Peut-être croyait-elle qu’elles lui apporteraient protection, ou peut-être voulait-elle priver Laban de ce qu’il chérissait.
Trois jours plus tard, Laban apprit que Jacob avait fui. Fou de rage, il rassembla ses hommes et se lança à sa poursuite. Après sept jours de marche acharnée, il les rattrapa dans la montagne de Galaad. Mais cette nuit-là, Dieu parla à Laban dans un songe : *« Garde-toi de parler à Jacob ni en bien ni en mal. »*
Malgré cela, Laban ne put contenir son amertume. « Qu’as-tu fait ? cria-t-il à Jacob. Tu m’as trompé, tu as emmené mes filles comme des captives de guerre ! Pourquoi es-tu parti en cachette, sans me laisser l’occasion de te bénir avec des chants et des festins ? Et pire encore, tu as volé mes dieux ! »
Jacob, ignorant le geste de Rachel, répondit avec assurance : « J’ai craint que tu ne reprennes tes filles par la force. Mais quant à tes dieux, que celui qui les a trouvés soit mis à mort ! Fouille tout mon camp, et si tu trouves quelque chose qui t’appartienne, prends-le. »
Laban parcourut les tentes, fouillant celle de Jacob, puis celle de Léa, sans rien trouver. Enfin, il entra dans la tente de Rachel. Celle-ci, assise sur les théraphim cachés sous un coussin de chameau, feignit d’être indisposée. « Ne t’offense pas, mon père, si je ne me lève pas, car j’ai ce qui est habituel aux femmes. » Laban chercha partout, mais ne trouva rien.
Honteux et vaincu, Jacob éclata : « Quelle est ma faute ? Quel est mon crime pour que tu me poursuives ainsi ? Après vingt années de labeur sous ton toit, mes mains ont travaillé pour toi, et tu as changé mon salaire à maintes reprises. Si le Dieu de mon père, le Dieu d’Abraham, ne m’avait protégé, tu m’aurais renvoyé les mains vides. Mais Dieu a vu ma souffrance et a rendu son jugement cette nuit. »
Les paroles de Jacob frappèrent Laban comme un coup. Malgré sa colère, il savait qu’il ne pouvait aller contre la volonté divine. Alors, avec un soupir résigné, il proposa une alliance. Ils érigèrent un tas de pierres en témoignage entre eux. Laban l’appela Yegar-Sahadutha (le tas du témoignage en araméen), tandis que Jacob le nomma Galed (le tas du témoignage en hébreu). « Que l’Éternel veille sur nous quand nous serons séparés, dit Laban. Si tu maltraites mes filles ou prends d’autres femmes, souviens-toi que Dieu est témoin entre moi et toi. »
Puis ils partagèrent un repas sur la montagne, scellant leur pacte dans la paix. Au matin, Laban embrassa ses petits-enfants et ses filles, les bénit une dernière fois, et retourna chez lui.
Quant à Jacob, il poursuivit sa route, le cœur plus léger, mais conscient qu’un autre défi l’attendait : son frère Ésaü, dont il avait autrefois volé la bénédiction. Mais cette fois, il ne fuyait plus. Il marchait, guidé par la promesse de Celui qui avait dit : *« Je serai avec toi. »*
Ainsi s’achevait un chapitre de tromperies et de réconciliations, tandis que commençait une nouvelle étape dans l’histoire de celui qui deviendrait Israël.