**Le Jeûne qui Plaît à l’Éternel**
En ces jours-là, dans le royaume de Juda, le peuple se rassemblait régulièrement dans les rues de Jérusalem, les mains jointes et le visage couvert de cendres, pour jeûner et prier avec ferveur. Les sacrificateurs sonnaient de la trompette, et les anciens se lamentaient, demandant à l’Éternel de les bénir. « Pourquoi jeûnons-nous, et Tu ne le vois pas ? Pourquoi humilions-nous nos âmes, et Tu ne le sais pas ? » murmuraient-ils avec amertume.
Un matin, alors que le soleil levant dorait les murs de la ville, un prophète nommé Ésaïe, rempli de l’Esprit de Dieu, se leva au milieu de la place publique. Son regard perçant traversait la foule comme une épée à deux tranchants. D’une voix retentissante, il proclama :
— Écoutez la parole de l’Éternel, vous qui cherchez la justice tout en pratiquant l’iniquité ! Vous jeûnez pour vos querelles, vous frappez du poing méchamment. Un jeûne comme le vôtre ne fera jamais entendre votre voix en haut !
Le peuple se taisait, certains fronçant les sourcils, d’autres baissant la tête sous le poids de la conviction. Ésaïe continua, ses paroles résonnant comme un torrent dans le désert :
— Est-ce là le jeûne que Je choisis, un jour où l’homme humilie son âme ? Courber la tête comme un roseau, se coucher sur le sac et la cendre, est-ce là ce que tu appelles un jeûne agréable à l’Éternel ?
Il leva les mains vers le ciel, comme pour puiser la vérité divine avant de la déverser sur eux :
— Le jeûne que Je préfère, n’est-ce pas celui-ci : délier les chaînes de la méchanceté, détacher les liens de la servitude, renvoyer libres les opprimés, et briser toute forme de joug ? N’est-ce pas partager ton pain avec celui qui a faim, recueillir chez toi les malheureux sans abri, couvrir celui que tu vois nu, et ne pas te détourner de ton semblable ?
Un murmure parcourut l’assemblée. Certains, dont un vieux marchand nommé Nathaniel, se souvinrent alors des pauvres qu’ils avaient ignorés devant leurs portes, des veuves qu’ils avaient exploitées dans leurs contrats. Une jeune femme, Myriam, serra les poings en repensant à son frère, qu’elle avait chassé par orgueil.
Ésaïe, voyant leurs cœurs s’attendrir, parla avec douceur, mais toujours avec autorité :
— Alors ta lumière se lèvera comme l’aurore, et ta guérison germera promptement ; ta justice marchera devant toi, et la gloire de l’Éternel sera ton arrière-garde. Alors tu appelleras, et l’Éternel répondra ; tu crieras, et Il dira : « Me voici ! »
Il fit une pause, laissant ses paroles pénétrer les âmes. Puis, avec un feu renouvelé, il ajouta :
— Si tu éloignes du milieu de toi le joug, le geste accusateur et les paroles méchantes, si tu donnes ta propre subsistance à l’affamé, si tu rassasies l’âme indigente, ta lumière se lèvera dans les ténèbres, et ton obscurité sera comme le midi. L’Éternel te conduira continuellement, Il rassasiera ton âme dans les lieux arides, et tu seras comme un jardin arrosé, comme une source dont les eaux ne tarissent jamais.
Un silence profond tomba sur la place. Peu à peu, les gens commencèrent à se disperser, non plus avec l’arrogance du rite accompli, mais avec le poids d’une conviction sainte.
Nathaniel, le vieux marchand, s’approcha d’un mendiant assis près des portes de la ville et, au lieu de détourner les yeux comme à son habitude, il lui tendit une bourse d’argent. Myriam courut chez son frère pour implorer son pardon. Des familles ouvrirent leurs portes aux étrangers, et les juges commencèrent à rendre des verdicts équitables pour les opprimés.
Et comme Ésaïe l’avait prophétisé, la bénédiction de l’Éternel se répandit sur eux. Leurs prières montèrent vers les cieux, et cette fois, Dieu les entendit.
Car ils avaient enfin compris : le vrai jeûne n’était pas une affaire de cendres et de sacs, mais de mains ouvertes et de cœurs brisés pour l’amour de Dieu et du prochain.