**Le Refus d’Obéir et la Fuite en Égypte**
Le soleil couchant étirait ses ombres sur les ruines de Jérusalem, une ville autrefois glorieuse, maintenant brisée par la main de Babylone. Les murs effondrés, les portes calcinées et le temple réduit en cendres témoignaient du jugement de l’Éternel. Au milieu de ces décombres, un petit groupe de Judéens survivants, dirigé par Yohanan fils de Karéach et Azaria fils de Hoshaya, se tenait devant le prophète Jérémie. Leurs visages étaient marqués par la peur et l’incertitude, mais aussi par une détermination têtue.
Depuis la chute de la ville, le gouverneur Guédalia, nommé par les Babyloniens, avait été assassiné par Ismaël, un prince de sang royal, plongeant le peuple dans une nouvelle terreur. Craignant les représailles de Nebucadnetsar, ces chefs militaires et les gens du peuple restés en Juda avaient imploré Jérémie de consulter l’Éternel pour savoir où ils devaient aller.
Pendant dix jours, Jérémie avait attendu dans la prière, écoutant la voix de Dieu. Et enfin, la parole de l’Éternel lui fut révélée. Rassemblant le peuple, il leur déclara d’une voix solennelle :
— Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël : Si vous restez dans ce pays, je vous bâtirai et ne vous détruirai pas, je vous planterai et ne vous arracherai pas. Car je me repens du mal que je vous ai fait. Ne craignez pas le roi de Babylone, car je suis avec vous pour vous sauver et vous délivrer de sa main.
Un murmure parcourut l’assemblée. Certains baissèrent la tête, d’autres échangèrent des regards inquiets. Jérémie poursuivit, sa voix s’alourdissant d’avertissement :
— Mais si vous dites : « Nous ne resterons pas dans ce pays », et si vous désobéissez à la voix de l’Éternel en disant : « Non, nous irons au pays d’Égypte, où nous ne verrons pas la guerre, où nous n’entendrons pas le son de la trompette, où nous ne manquerons pas de pain », alors écoutez la parole de l’Éternel : Vous périrez par l’épée, la famine et la peste dans le lieu où vous voulez aller pour y séjourner.
Le silence qui suivit fut lourd. Les yeux de Yohanan étincelèrent de défi.
— Tu mens ! s’écria-t-il. L’Éternel ne t’a pas envoyé pour nous dire de rester ici et de mourir sous l’épée des Chaldéens !
Azaria et les autres chefs approuvèrent bruyamment. Malgré les supplications de Jérémie et de Baruch, son fidèle secrétaire, leur cœur était endurci. Ils accusèrent même le prophète de vouloir les livrer à la mort.
Ainsi, dans un acte de rébellion ouverte contre la parole de Dieu, Yohanan et les chefs prirent tous les survivants de Juda—hommes, femmes, enfants, et même les princesses qui avaient échappé à la déportation—et partirent en Égypte, emmenant de force Jérémie et Baruch avec eux.
Le voyage fut long et pénible. Les chariots grinçaient sous le poids des provisions et des biens sauvés de Jérusalem. Les visages étaient marqués par la fatigue et l’anxiété. Jérémie marchait parmi eux, le cœur brisé, sachant que leur fuite était une condamnation.
Ils traversèrent le désert du Sinaï, et enfin, les fertiles plaines d’Égypte s’étendirent devant eux. Arrivés à Tahpanhès, une ville frontalière, ils crurent avoir trouvé la sécurité. Mais Dieu n’avait pas abandonné son prophète.
Un jour, sous les larges colonnes du palais de Pharaon, Jérémie reçut une nouvelle parole de l’Éternel. Il rassembla les chefs et le peuple, et sous leurs regards méfiants, il prophétisa avec autorité :
— Ainsi parle l’Éternel des armées, le Dieu d’Israël : Voici, je vais envoyer chercher Nebucadnetsar, roi de Babylone, mon serviteur, et il placera son trône sur ces pierres que j’ai cachées ici. Il étendra son tapis royal sur elles, et il frappera l’Égypte. Ceux qui sont destinés à la peste mourront par la peste, ceux à l’épée par l’épée, ceux à la famine par la famine, et ceux à la captivité en captivité !
Les Judéens pâlirent, mais leur cœur resta endurci. Ils continuèrent à sacrifier à la « reine du ciel », comme ils l’avaient fait en Juda, croyant que c’était pour cette idolâtrie qu’ils avaient été punis. Mais Jérémie leur déclara :
— C’est parce que vous avez abandonné l’Éternel que le malheur vous poursuit. Votre refuge en Égypte ne sera qu’un piège !
Les années passèrent. Et comme Jérémie l’avait annoncé, Nebucadnetsar envahit l’Égypte. Les Judéens qui avaient fui la guerre la retrouvèrent au milieu des cruautés des Babyloniens. La famine, la peste et l’épée accomplirent la parole de Dieu.
Ainsi, ceux qui avaient refusé d’écouter la voix de l’Éternel périrent loin de la terre promise, dans l’amertume de leur désobéissance. Et Jérémie, le prophète rejeté, resta parmi eux jusqu’à la fin, témoin silencieux de la fidélité et de la justice de Dieu.
**Fin.**